En 2012, l’équipe du professeur Alain Malafosse du Département de psychiatrie de la Faculté de médecine de l’Université de Genève (UNIGE), en collaboration avec le Département de génétique et de développement, a démontré que la maltraitance infantile, les traumatismes, ou les situations de stress post-traumatique, laissent des traces dans l’ADN du sang des victimes jusqu’à la 3ème génération.
Ces travaux sont publiés dans la revue Transnational Psychiatrie. 1
Le groupe de recherche du Professeur Alain Malafosse, a ainsi démontré que l’association entre maltraitance infantile et certaines pathologies adultes résultait d’une modification des mécanismes de régulation des gènes.
Cette étude a porté sur 101 sujets adultes souffrant d’un trouble de la personnalité borderline, caractérisé notamment par une instabilité dans les relations interpersonnelles, les émotions et l’impulsivité.
En examinant leur ADN, issu d’une prise de sang, les chercheurs ont observé des modifications épigénétiques, c’est-à-dire dans les mécanismes de régulation des gènes, chez les participants ayant été maltraités durant leur enfance (abus physique, sexuel et émotionnel, carences affectives…).
L’équipe scientifique a montré que plus la sévérité de l’abus ou du traumatisme était importante, plus la méthylation (la modification) du gène était considérable
Ainsi, les traumatismes semblent capables de s’imprimer en nous de manière plus profonde, jusqu’à modifier la transcription de nos gènes. Car notre environnement a une influence sur l’expression génétique. Pour comprendre comment ce phénomène, il faut savoir que toute exposition à un stress, physique ou psychologique, entraîne une série de réponses immédiates. Or nos gènes y participent directement par la production de protéines et de l’hormone cortisol, par exemple. « Dans le cas d’un stress important, explique Ariane Giacobino, généticienne aux Hôpitaux universitaires de Genève, les gènes impliqués dans la réponse au stress subissent des modifications chimiques que l’on appelle ‘méthylations génétiques’ ». 2
Plus étonnant encore, ces méthylations génétiques semblent se transmettre aux générations suivantes : « En suivant la descendance des victimes de traumatismes, on remarque qu’elle présente des symptômes de stress post-traumatique semblables à ceux de ses parents, alors même qu’elle n’a rien vécu de tel. Ces enfants sont plus déprimés, plus anxieux et risquent davantage de développer un trouble psychiatrique », détaille le Dr Nader Perroud, psychiatre aux Hôpitaux universitaires de Genève. Autrement dit, les traumatismes peuvent laisser des traces dans notre ADN et se transmettre jusqu’à 3 générations…
Il y a cependant une bonne nouvelle : cette trace, cette signature peut être effacée par des thérapies et des traitements appropriés.